Fondation du Monastère de Metz, 56ème de l’Ordre, établi d’abord le 24 avril 1633 – retranscription de l’original sis aux Archives Départementales de Moselle

Mort de la Mère Françoise Catherine de Moncels.

Cette année nous fut doublement sensible par la mort de trois de nos Soeurs ; la dernière fut notre respectable ancienne Mère Françoise Catherine de Moncels, que le Seigneur retira de cette vie le 7 juin de cette même année 1709. Quelque temps après sa dernière déposition, en 1688, elle fut attaquée d’un rhumatisme si violent, qu’elle resta comme percluse de tout son corps, souffrant néanmoins des douleurs excessives. Nous étions trop intéressées à sa conversation pour ne pas employer tout ce qui pouvaient contribuer à sa guérison. Un remède qu’on nous avait dit devoir l’opérer, la fit au contraire tomber dans une maladie très dangereuse, qui nous ôta l’espérance de l’avoir soulagé, et nous alarma beaucoup par le triste effet qu’il produisit ; car la bonne mémoire dont elle avait joui jusqu’alors fut beaucoup diminuée, cependant son bon jugement resta toujours libre.

Réduites à la nécessité de souffrir sans espérance d’adoucissement, et dans l’impuissance de se remuer sans le secours d’autrui, cette Très Honorée Sœur supporta 15 ans les cuisantes douleurs de ce rhumatisme, avec une patience édifiante, et une parfaite résignation aux volontés du Seigneur. Au milieu de ses plus vives douleurs, elle n’ouvrait la bouche que pour offrir ces maux à Dieu en expiation de ses péchés, et pour témoigner à nos Soeurs la peine qu’elle ressentait de leur devenir, disait-elle, si à charge par les services qu’elles étaient obligées de lui rendre. Lorsqu’on la visitait pour la consoler, elle édifiait non seulement par ses manières honnêtes, sa douceur, sa patience, mais encore par ses saints entretiens, dans lesquels elle citait à propos quelques paroles de l’écriture sainte pour nous encourager dans la pratique de la vertu, et dans une fidélité exacte à nos saintes observances. Le Seigneur voulant couronner la patience de sa fidèle épouse, permis que la fièvre se joignit à tous ses mots, avec une fluxion et oppression de poitrine, pour nous annoncer sa délivrance prochaine. Elle se disposait depuis longtemps à ce dernier passage, et disait avec Saint-Paul, qu’elle souhaitait d’être dégagée des liens de son corps pour être avec Jésus-Christ. Elle vit donc arriver avec joie sa dernière heure, et remplie de confiance dans les miséricordes du Seigneur elle demanda les derniers sacrements, qu’elle reçut avec la ferveur et la dévotion d’une âme qui ne respire plus que l’éternité. Peu après les avoir reçus, elle mourut dans le baiser du Seigneur, le jour de la fête du Sacré-Coeur de Jésus ; elle était âgée de 85 ans moins 3 mois, dont 71 passé dans la sainte Religion.

Cette Très Honorée Soeur fut regrettée généralement de toute notre Communauté, où elle était aimée, considérée, et regardée comme le soutien de notre maison ; la vie édifiante qu’elle y a menée nous laissa dans la confiance qu’elle nous obtiendrait du Seigneur la grâce de marcher sur ses traces. Dans le désir de tirer plus de profit de notre travail, qui ne nous rapportait pas beaucoup par les ouvrages de tapisserie, notre chère Mère avait établi depuis quelques années une espèce de manufacture où l’on fit nos étoffes, nos toiles et d’autres ouvrages qui nous furent très avantageux. Une bonne partie de nos heures étaient assidues à ce travail, et prenait même sur leur sommeil pour avancer davantage, y étant animées par l’exemple de notre Très Honorée Soeur la déposée, qui nous était en tout une règle vivante.