Fondation du Monastère de Metz, 56ème de l’Ordre, établi d’abord le 24 avril 1633 – retranscription de l’original sis aux Archives Départementales de Moselle

Mort de la Soeur Déposée Barbe Éléonore Guichard.

Elle avait été précédée de sept mois par notre respectable Mère Barbe Éléonore Guichard, qui depuis deux ans était dans un état continuel, qui nous faisait voir que le Seigneur achevait de purifier sa victime, pour la faire entrer de suite en possession de son royaume. Aucun soin ne fut négligé pour nous conserver ce modèle de vertu, qui continuait de nous édifier par la pratique constante d’une profonde humilité. Notre chère Mère fut aussi surprise qu’infligée de l’assurance que lui donna cette chère Déposée, dans sa retraite de 1749, quelle serait la dernière de sa vie, et que le Seigneur, dont elle ne pouvait trop bénir les miséricordes, prenait soin par Lui-même de la préparer au redoutable passage du temps à l’éternité. Les humbles sentiments qu’elle avait d’elle-même lui faisaient vivement appréhender les terribles jugements du Seigneur ; il calma par un effet de sa bonté ses pénibles dispositions, qu’il n’avait permises dans notre chère Soeur que pour servir d’épreuve à sa vertu, et non pour en être l’écueil. Elle eut le bonheur de jouir d’une parfaite tranquillité d’esprit durant les cinq jours de sa dernière maladie, qui fut une pluri-pulmonie. Le crachement de sang et l’ardeur d’une fièvre continue, ne nous annoncèrent que trop la perte dont nous étions menacées. Monsieur notre médecin en forma le même jugement dès la première visite ; notre recours, dans notre profonde douleur, fut de nous adresser au Ciel par des voeux et des prières, pour obtenir la prolongation de jours si précieux à notre Communauté. Quelques justes que nous parussent nos désirs ils ne furent point exaucés ; le Seigneur avait résolu de couronner la persévérante fidélité de notre vertueuse Soeur. Attentive à profiter de tous les moments qui lui restaient, elle ne s’occupa qu’à faire un saint usage de ses maux ; ils ne diminuèrent point son application intérieure ; toujours unie à Dieu elle attendait, avec une parfaite adhérence à sa volonté, tout ce qu’il lui plairait ordonner d’elle. Ce fut dans ces saintes dispositions qu’elle reçut les derniers sacrements, avec les sentiments d’une foi vive animée par les ardeurs d’une fervente charité. Elle prie encore le soin en cette extrémité de nous consoler de l’affliction que nous causait sa séparation, nous exhortant à adorer les desseins du Seigneur par notre soumission à ses volontés. Nos Sœurs Infirmières avertirent que la chère malade s’affaiblissait, notre chère Mère se rendit à sa chambre et remarqua que l’oppression de poitrine augmentait considérablement, et annonçait ses derniers moments. On dit les prières de la recommandation de l’âme, pendant lesquelles notre Très Honorée Mère s’apercevant que la chère mourante était extrêmement agitée, elle lui dit qu’elle était persuadée que ces agitations extérieures n’influaient pas sur les dispositions de son esprit et de son cœur. Elle répondit : « non, ma Mère, l’un et l’autre sont en paix, et ne désire que l’accomplissement des volontés du Seigneur ». Après ces paroles elle perdit connaissance, un quart d’heure après elle expira en présence de plusieurs de nos Sœurs et de notre Mère. La certitude morale du souverain bonheur dont elle était, ou allait être jouissante, fut le seul motif qui put adoucir l’amertume de notre juste douleur. Ce fut le 8 avril 1750 que nous fîmes cette perte, notre respectable Sœur était âgée de 51 ans et en avait 30 de profession.